It's the disease that we crave, alone at the end of the rave [ Chris . Haelya ]

Pendant un instant, elle ne bougea pas et fut reconnaissante qu'il en face de même. Il n'osait surement pas la secoué, elle connaissait l'effet que ces petites séances abominables avaient sur les gens. Aaron et Remus y avaient assistés, restant impuissants face à sa douleur, ne sachant pas quoi faire et ne voulant pas la briser d'avantage. Parce qu'elle semblait cassée. Elle le savait, elle ressemblait à une sorte de poupée de chiffon désarticulée, comme si tous ses os avaient été brisés méthodiquement. Physiquement, elle avait parfois l'impression que c'était vrai, qu'on lui cassait les membres, et si elle avait le malheur de ne serait-ce que respirer trop fort, elle partirait dans des délires fiévreux et peu rassurant.

Soudain, alors qu'elle s'était calmée et qu'elle s'aventurait à respirer un peu plus convenablement, à emplir ses poumons d'une manière viable, laissant l'air frotter sa gorge comme s'il était chargé d'éclats de verre, elle se sentit balloter, puis le mouvement revint plus équilibré, plus régulier. Elle comprit rapidement ce qu'il se passait, mais malgré ses yeux ouverts, elle ne vit rien des murs qui défilaient ou du paysage qui bougeait devant elle.

Chris la portait. Un parfait inconnu lui venait en aide, sans raison autre qu'une générosité qu'elle ne comprenait pas mais qu'elle trouvait louable. Il la portait et marchait vers le château, prenant garde à ne pas la secouer, faisant attention à ce que personne ne les vois. Il monta les marches du perron, et alors que les notions de temps et d'espace de l'adolescente se perdaient dans les nimbes d'une fatigue post-torture, elle entendit soudain un brouhaha non loin. La Grande Salle. La foule, le monde, les gens, les yeux braqués sur elle, sur son corps pâle et malade, sur ses tares, ses faiblesses, sur la misère qu'elle représentait.

Il ne s'attarda pas. Et c'était tant mieux. Elle ne voulait pas qu'on la voit. Sirius et Remus s'inquièterait. Remus surtout, et il ne devait pas savoir ce qu'elle faisait hors du château à une heure pareille. Et puis l'incident avec Albus lui revint, la jalousie du jeune homme quand il en avait vu un autre la tenir par le bras... Un autre dont elle avait voulu se débarrasser et qui avait fini avec le nez cassé... Elle était plus que consciente du quiproquo qui naitrait si Remus sortait à présent de la Grande Salle. Bien sur, il passerait rapidement outre les bras de Chris autours d'elle, prenant conscience de son état, mais même, ce n'était pas la peine...

Bientôt, ils furent devant leur salle commune, et elle se sentit soulagée. En passant la porte dissimulée par le tableau, ils diviseraient par quatre le nombres d'élèves susceptible de les voir, et c'était tant mieux... Puis l'ambiance familière de la pièce prit le dessus. Il faisait froid ici, comparé à la salle commune des Gryffondors, mais c'était une espèce de maison, un endroit qui malgré son glauque apparent était accueillant. D'une manière un peu tordue, elle se sentait bien ici, même si les souvenirs y étaient mitigés...

Elle s'autorisa à fermer les yeux, réalisant que ses larmes coulaient toujours, bien que moindre. Maintenant, les courbatures allaient prendre le dessus. La fatigue, la paranoïa temporaire, et les tremblements. Elle tenterait de dormir, tomberait d'épuisement au bout d'un temps, se réveillerait après un cauchemar vif et réaliste et ferait semblant d'aller bien. Tout rentrerait dans l'ordre...

Seulement, elle ne comprenait toujours pas pourquoi il continuait. Pourquoi il ne lui laissait pas la paix maintenant qu'il avait ce qu'il voulait. Elle, son allégeance...

La porte claqua derrière elle et elle revint à l'instant présent, ouvrant les yeux à la volée et fixant la pièce vide. Avec un peu de chance, Chris ne serait pas quelqu'un de curieux, il la poserait et partirait sans demander son reste, trop effrayé par ce qu'il avait vu. Mais c'était le problème avec les inconnus : impossible de savoir ce qu'ils pensaient, ferraient, diraient. Elle croisa mentalement les doigts pour avoir ne pas avoir à faire à quelqu'un d'intrusif...

En un rien de temps, elle se retrouva dans un canapé, près du feu quasi-inutile tant il était faible, et alors qu'elle fixait Chris pour tenter d'anticiper ne serait-ce qu'un iota de ce qu'il pouvait bien prévoir, elle le vit sortir sa baguette et bientôt, un kit de potion arrivait dans la salle commune, suivit de près par une couverture. Elle jeta un rapide coup d'œil à la boite qui se posait devant Chris, un peu incrédule. Pensait-il réellement pouvoir la soigner ? Hormis Rogue, elle doutait fortement que quelqu'un ne soit capable de la soulager, et encore, c'était ses capacités de Mangemort qui le rendait utile, pas son statut de maître des potions...

Cependant, avant qu'elle n'ai pu lui dire qu'il perdait son temps et qu'elle tenait plus du cas désespéré que du cobaye pour apprenti guérisseur, il avait saisit sa main et bougeait délicatement ses doigts, comme pour vérifier que ses os n'étaient pas cassés. Ils ne l'étaient pas. Voldemort ne poussait jamais le vice jusqu'à la blesser réellement, comme un enfant capricieux qui martyrisait ses jouets mais ne les cassait pas, sachant très bien qu'il n'en aurait pas d'autres en échange... La comparaison aurait presque été risible. Le problème était le presque, qui venait de l'état de l'adolescente, elle n'avait pas à la tête à le railler, à se moquer...

Finalement, Chris lâcha sa main et lui présenta deux fioles avant d'expliquer :

- La bleue soignera les dommages à l'intérieur de ton corps. S'il y a des brûlures ou certaines déchirures, elles ne seront plus là. La violette aidera ton cœur à irriguer correctement les points qui ont été touchés. Tu reprendra des couleurs.

Silencieusement, Haelya saisit la deuxième. Puis elle afficha un rictus qui aurait pu passer pour un sourire si elle n'avait pas manqué cruellement de force. D'une voix rauque, vide, brisée par ses hurlements, et encore emplit de larmes, elle répondit :

- La première est... inutile. Il n'y a rien qu'on puisse faire pour ça, les blessures n'existent pas...

Et c'était la pure vérité. Que faire contre un mal qui venait plus de sa tête qu'autre chose ? Que faire contre un bourreau invisible, contre quelqu'un que de toute façon n'était pas mortel ?

Se recroquevillant un peu, elle tenta de défaire le cachet qui tenait la minuscule bouteille fermée et alors qu'elle peinait, ses doigts manquant soudainement de précision et de force, elle se demanda ce qu'il lui prenait d'accepter des potions venant de la première personne croisée dans la volière... Certes, elle faisait confiance à Rogue, avalait tout ce qu'il lui donnait, mais d'un autre côté, le Mangemort savait ce qui l'attendait si il la tuait, ou l'abimait. Seul le maître et Bellatrix avait le droit de s'acharner sur elle, sauf autorisation spéciale que le professeur n'avait pas...

Se résignant, elle porta à nouveau son regard sur le jeune homme et affichant un sourire désolé, elle tendit la fiole vers lui. Elle n'y arrivait pas, elle avait encore besoin d'aide, comme l'assistée qu'elle était...

- Merci.

Cela sortait un peu de nul part, mais elle avait trop mal au crane pour se soucier de l'incongruité de ses propos.

Il saisit la fiole, l'ouvrit et la lui rendit, l'observant attentivement alors qu'elle buvait le contenu. Cela tenait en une gorgée, mais elle se sentait soudain anxieuse. Pourquoi la fixait-il ainsi ? Attendait-il le résultat de sa potion pour savoir si oui ou non il l'avait faite correctement ? Et pire encore, elle venait peut-être d'avaler du Veritasérum sans le savoir... certes, la potion de base était censée être transparente, inodore, et ne pas avoir de gout, mais les colorants alimentaires moldus faisaient fureur chez les sorciers ces derniers temps.

Elle cessa de paniquer quand les premiers effets arrivèrent. Elle se sentait.... saoul. C'était fulgurant, comme si elle avait pris un alcool très concentré, et une vague de chaleur emplissait son corps pâle et tremblant, la laissant surprise. Elle sentait ses joues la bruler, presque douloureusement en fait.

- Ca arrive souvent, ce genre de choses?

Elle eut envie de répondre "oui", mais se retint. A la place, elle se contenta de hausser les épaules, d'un air vague. C'était récurent, oui, et de pire en pire, malgré ses efforts, malgré Remus qui était là après pour s'occuper d'elle. Elle sentait la fin venir, sachant très bien qu'un jour ou l'autre, Voldemort se lasserait totalement d'elle et la tuerait...

Elle se rendit alors compte que les courbatures passaient. Ce n'était ni possible, ni normal. D'ordinaire, il lui fallait près de deux jours pour s'en remettre totalement, et pourtant, là, elle se sentait déjà moins raide. Comme si ses nerfs se relâchaient doucement, et cessaient de protester contre l'agression subit.

Elle tenta de bouger, pour vérifier, et alors qu'elle s'enfonçait dans le canapé, s'y recroquevillant et resserrant le plaid autours d'elle, elle réalisa que la potion du jeune homme avait été réellement efficace... Elle le regardait un peu incrédule... Admirative aussi, parce que les potions n'étaient pas son fort, loin de là même et que cet art restait très obscur à ses yeux.

Finalement, elle parla, et les mots sortirent un peu étrangement, accentuant son sentiment d'ivresse :

- Ça dépend de la valeur que l'on donne à "souvent"...

- Quelle est ta valeur de "souvent"?

Il la fixait à présent. Vraiment. Elle aurait du se taire. Elle aurait du garder sa bouche fermée et se contenter de paraître faible et fragile. Montrer qu'elle allait mieux lui prouvait qu'il l'avait aidé, certes, mais cela engageait aussi une discussion... "puisque tu vas bien, tu peux parler, tu peux t'expliquer, non ?" . Sauf qu'elle ne voulait pas. Elle ne pouvait pas. Il ajouta :

- Oh, à propos, tu parlera normalement dans quelques minutes. La sensation un peu bizarre est normale.

Elle sauta sur l'occasion. Des banalités, des banalités auxquelles elle n'était pas censée répondre. Très bien... Elle hocha la tête pour montrer qu'elle comprenait et se blottie un peu plus dans les coussins du canapé, croisant ses bras au dessus de sa poitrine, sous la couverture. Elle prenait si souvent cette position, ces derniers temps, que se retrouver à moitié camisolée dans ses propres bras ne la choquait même plus. Ça devenait une habitude, elle se tenait en un seul morceau, voulant empêcher son cœur de cogner violemment et douloureusement contre ses côtes. Sauf que ça ne suffisait pas.

Haelya bascula sa tête en arrière, contre l'accoudoir du sofa, et ferma les yeux. Elle savait très bien qu'elle ne dormirait pas, qu'elle n'y arriverait pas, et que quand bien même elle parviendrait à somnoler, c'était pour être ramenée brutalement à la réalité par un cauchemar plus vrai que nature.

- Comment tu fais, d'habitude?

Elle redressa la tête, le regardant pendant un instant, cherchant le sens de sa question, mais avant qu'elle n'ai pu se rendre compte qu'elle avait de toute façon trop mal au crane pour réfléchir, il ajouta, éclaircissant ses propos :

- Je veux dire... Lorsque ces attaques surviennent, les conséquences ne s'estompent pas sans remède puissants. Tu les supporte à chaque fois? Ou est-ce qu'on t'aide?

Elle comprenait à présent. Et la question était légitime. A vrai dire, il aurait carrément pu lui demander ce qu'elle aurait fait sans lui, et elle se serait trouvé dans l'incapacité de répondre. Elle serait restée des heures dans la volière, jusqu'à avoir la force d'envoyer un Patronus pour qu'on vienne la chercher... mais encore, à qui l'aurait-elle envoyé. Elle aurait du justifier de sa présence là bas, et ça rayait beaucoup de monde de la liste. Remus ne devait pas savoir, jamais, elle ne voulait pas, elle ne supporterait pas qu'il la regarde avec des yeux pleins de déception...

D'une voix encore un peu pateuse, elle répondit simplement :

- J'encaisse. J'attends... ça passe. Tout passe... Rogue m'aide, parfois, mais il ne m'aime pas, et je n'aime pas supplier, alors c'est compliqué.

Il y avait tant de résignation dans sa voix qu'elle se sentit soudain amère, presque aigrie. Où étaient donc passés ses rêves, ses espoirs ? En dehors des bras de Remus, elle ne voulait plus vivre, et pour y rester, elle venait de faire la pire des concessions... Elle avait honte, tellement honte d'avoir envoyé cette lettre... Les larmes revinrent sur ses joues, emportant les restes de son maquillage, les restes du masques, et la révélant, famélique et pâle, mourante et épuisée...

Un bruissement s'éleva dans la pièce et bientôt, Chris fut à côté d'elle, soulevant son visage délicatement pour la regarder dans les yeux. L'image était brouillée, à travers ses larmes, les contours étaient flous, mais sa voix en revanche était précise :

- Haelya, lorsque ça t'arrivera, et que tu ne voudra pas voir Rogue, je veux que tu te sentes libre de venir vers moi.

Il resta silencieux et immobile pendant un instant avant de reprendre.

- Je n'ai pas besoin de savoir. Je pense juste que tu as déjà assez de mal avec la souffrance que tu t'infliges toi même, pour que les douleurs extérieures te restent dans la peau.

Elle ne comprenait pas. Elle ne saisissait pas la proposition. C'était insensé, totalement stupide, complétement absurde. Ils ne se connaissaient pas, et avec toutes les rumeurs qui couraient autours d'elle, il aurait du se tenir loin. Surtout quand on savait que la plupart des rumeurs étaient fondées. Folle, instable, délirante, dangereuse, elle avait entendu tant de ces mots à son propos qu'elle n'y prêtait même plus attention, de toute façon, ils avaient raison.

- Pourquoi m'aiderais-tu ? Tu ne me connais pas, tu ne sais rien de moi, et tu prendrais des risques pour me soigner quand c'est interdit et que ça te ferait expulser de Poudlard si on t'y prend ? demanda-t-elle alors froidement, sachant que peu de gens avaient le droit de guérir et de distribuer des potions.

Elle regretta un peu d'ailleurs, étant donné que Chris l'avait aidé, mais elle ne pouvait pas se permettre de le laisser s'approcher ainsi. Il avait beau vouloir parler de discrétion et de vie privée, dire ne pas souhaiter être au courant, il arriverait un moment où il deviendrait intrusif, si elle le laissait faire et retournait le voir pour de l'aide. C'était hors de question.

D'un mouvement vif et agacé, elle chassa sa main, se tapissant encore un peu plus dans le canapé. Elle se comportait comme un animal terrifié, comme une petite fille appeurée. Et en un sens, c'était exactement ce qu'elle était. Sur la défensive, elle lui jeta un regard froid mais plein de larmes.

Il ne recula pas, et en fait, ça semblait logique. Elle ne devait pas avoir l'air bien menaçante, compte tenu de son état, elle ne devait pas faire peur. Enfin, si. Peur à voir, mais ça ne suffisait pas à faire disparaître quelqu'un.

- Parce que tu dois apprendre à ne pas te méfier de tout le monde. Tu peux être seule si tu le choisis, te battre seule. Ça doit être honorable, mais tu as moins de chances de remporter la bataille.

Elle le regarda, un peu incrédule. Elle se trouvait plutôt naïve et il disait qu'elle devait faire plus confiance aux gens, ne pas être sans arrêt sur la défensive.. C'était ridicule, elle n'était pas braquée contre le monde, au contraire, et ça la détruisait doucement mais surement... Quand à la solitude... ce n'était plus vrai, elle partageait avec Elana et Effy sa condition, et ses nuits avec Remus. Elle se "battait" au côté de Sirius aussi, dans une quête de liberté un peu dérisoire mais qu'elle chérissait... Il reprit :

- Et puis... Un renvoi n'est pas si grave. Poudlard n'est pas réellement ma maison, je peux encore partir sans regrets.

D'un revers de main, elle essuya ses larmes avant de serrer à nouveau la couverture autours de son corps. Elle avait froid. C'était un des inconvénients des dortoirs des Serpentards : il y faisait humide, et l'absence de fenêtre et donc de contact avec le soleil rendait les lieux atrocement glaciaux. Elle aurait bien déserté, mais s'installer dans la salle sur Demande ou dans le dortoir des garçon de Gryffondor ne lui semblait pas la meilleure idée au monde.

- Ce n'est pas non plus ma maison, et pourtant, j'aime cet endroit... Ils ont brulé le foyer que j'avais, après m'en avoir arraché et l'avoir réduit en miettes, alors je refuse de m'attacher à quoi que soit d'autre de matérielle, sinon, on me le prendra aussi... pareil pour les humains, je fais prendre beaucoup de risque aux gens qui sont près de moi...

Sa voix était à la fois résignée et sarcastique et bien entendu, Galway était toujours debout, c'était une simple métaphore, mais elle se rendit compte qu'elle parlait trop, elle en disait trop, elle donnait trop de matériel à Chris pour qu'il pose des questions et élabore des théories, il fallait qu'elle file d'ici au plus vite. Elle planta ses bras tremblants dans le canapé et tenta de se relever mais n'y parvint évidemment pas. Pas de douleur, certes... mais pas de force non plus, résultat du remède du jeune homme...

- Tu sais, s'ils sont près de toi, c'est qu'ils t'aiment, et acceptent de prendre ces risques pour toi. En retour, fais leur confiance, et laisse les être là où ils veulent être : près de toi.

Il ajouta :

- Tu sera bientôt sur pied. Je peux m'en aller maintenant, si tu préfères être seule.

Elle hocha la tête, ne sachant même plus ce qu'elle voulait. Elle était à bout de force et mentalement sur le point de craquer, devenant de plus en plus fragile et dangereuse. Un peu comme quand elle avait mis les pieds la première fois à Poudlard, et qu'elle avait tenté de mettre fin à ses jours, trop fatiguée pour continuer. Mais elle s'était ratée, et Aaron l'avait sauvé. Aaron. Elle l'avait brisé parce qu'elle ne savait justement pas ce qu'elle voulait, parce qu'elle n'était qu'une gosse capricieuse et lunatique.

- Et si je ne veux pas ? Et si je ne vaut pas la peine qu'on prenne des risques pour moi ? Je ne veux pas que Remus, que Sirius, ou que n'importe qui se fasse tuer en tentant de me protéger, parce que de toute façon, ça ne servira à rien, ils m'auront quand même...

Voila qu'elle s'énervait et en disait trop, d'une voix partant dans les aigus et hochant toujours la tête. Elle ne pouvait pas nier que toute cette histoire, son histoire, la terrifiait. Elle avait beau en parler avec un certain dédain la plupart du temps, le prendre avec un détachement résigné, elle avait peur, terriblement. Seulement il n'y avait pas d'issue.

- Laisse tomber, ils ont tous raison, je suis folle.

Elle appuya son front contre ses genoux, cachant son visage.

- Tu t'en fiches pas mal, tu as tes propres problèmes. Les autres ne seront jamais à ta place, et toi seule peut interpréter tes actes, savoir ce que tu es. Et ceux que tu laisses entrer dans ton monde, bien sûr.

Elle ne se redressa pas, mais c'était tout juste. Il comprenait. Aussi impossible que cela puisse paraitre, il comprenait qu'elle se fichait bien de l'opinion des badauds et des désœuvrés qui la critiquaient grassement, puisqu'ils ne saisissaient pas ses douleurs, ses nuances, sa façon d'être. Il ne jugeait pas, il le la jugeait pas, et c'était un changement appréciable, compte tenu du fait qu'il n'était pas beaucoup plus qu'un parfait inconnu.

- Tes intentions sont louables. C'est une bonne chose que de vouloir laisser ceux qui t'aiment en dehors de tout danger. Mais si tu affrontes le danger seule, sans en faire part, tu va te consumer. Et ça leur fera encore plus mal que si c'était eux.

Elle imaginait oui. Elle redoutait même. Elle avait rêvé d'un jour d'été où Remus se retrouverait nez à nez avec son avis de décès. Le cauchemar semblait si réaliste, si atrocement détaillé, qu'elle n'avait pas pu s'endormir à nouveau et qu'elle était restée assise sur son lit pendant quatre heures, tremblante et terrifiée. Seulement, elle ne pouvait pas se résoudre à lui dire ouvertement qu'elle allait mourir, ni même à lui décrire sa douleur. Il s'en doutait, bien sur, puisqu'il avait assisté à une des crises les plus violentes, mais jamais il ne pourrait accepter ce qu'il subissait :

- Je ne me relèverais pas si jamais il arrive malheur à quelqu'un que j'aime par ma faute... Tu n'imagines pas ce qu'ils risquent... Le fait est que je devrais repousser tout le monde, mais que je ne peux pas.

Elle releva la tête, appuyant sa tempe contre ses genoux et fixant Chris avant de reprendre :

- Sirius est le grand frère que je n'ai jamais eu, et je suis dépendante de Remus, je l'aime trop pour trouver la force de le protéger, c'est un cercle vicieux...

Elle se tut, revoyant la scène où le jeune homme tenait dans ses mains la Gazette indiquant qu'elle était morte. Cela tomberait comme une épée de Damoclès, puisqu'elle lui dirait sans doute partir pour Galway, que tout irait bien et qu'elle reviendrait à Londres durant l'été pour le voir, et ce aussi souvent qu'elle le pouvait... Elana avait raison, le lui dire, c'était risquer de mettre Sirius au courant également et placer les maraudeurs dans des dangers qu'ils savaient très bien s'attirer tous seuls. Ils se feraient tués, elle ne supportait pas l'idée...

- Alors bats toi pour eux. Par amour, on peut tout endurer. Bats toi pour eux et laisse les se battre pour toi. Si vous vous êtes ensemble du même côté, vous avez bien plus de chance de triompher.

Haelya resta silencieuse, ne voulant pas partir dans cette discussion. Elle savait très bien qu'il ne réalisait pas que Sirius et Remus, et peut-être même James et Peter, ne resteraient pas gentiment assis comme des enfants sages en apprenant qu'elle était condamnée et qu'en Juin, lorsqu'elle mettrait les pieds au manoir Malefoy, elle se ferait tuée dans préambule et sans scrupules. Et quand bien même les jeunes gens se tiendraient calme et raisonnables, quand bien même ils s'organisaient, ne fonçaient pas bêtement têtes baissées pour tenter de la sauver ou de la venger, ils ne pouvaient rien faire. Rien du tout, parce qu'à l'évidence, il y avait certaines forces contre lesquelles on ne pouvait pas lutter... Voldemort en faisait partie, rien ne changerait cela, pas même toute la bonne volonté du monde.

Chris reprit alors, la tirant de ses pensées, la laissant sur la conclusion qu'ils ne devaient pas savoir, Jamais.

- Mais il faut que tu trouves un moyen d'être fière de toi. Je ne sais pas ce que tu as fait qui a pu te mettre dans cet état, mais il faut que tu réussisse à passer au dessus, et à t'estimer à nouveau.

Elle se redressa cette fois, commençant à fatiguer et à perdre patience. Tant et si bien qu'elle est un jour eut de la patience, en fait. Il ne savait pas, il ne pouvait pas comprendre. Bien sur, elle ne lui expliquait pas tout, mais il y avait une raison. Il ne se doutait même pas de qui elle était, il n'en avait aucune idée parce que miraculeusement, de toutes les rumeurs qui circulaient à son compte dans l'école, la plus importante n'était jamais sortie, on ne disait rien sur sa paternité, ni sur le chantage physique et douloureux qu'elle subissait pour rentrer dans les rangs des Mangemorts.

D'une voix froide, un rien agacé, elle déclara alors :

- J'ai bafoué en 2 minutes plus d'une année et demi de combat acharné contre un bourreau qu'on ne peut pas détruire, alors me battre, être fière de moi-même, c'est bien joli comme conseil, mais tu n'as pas idée, Chris, de ce que cela peut vouloir dire ici...

Elle stoppa, réalisant qu'elle partait après lui quand c'était à elle-même et à son père qu'elle en voulait, et qu'il n'avait rien fait d'autre que d'être là au mauvais moment, et de gracieusement l'aider, sans même avoir à se faire prier pour s'executer.

Plus calme, elle reprit :

- Je suis une lâche, et une hypocrite. Parce que j'avais de belle idée, des convictions, que mon allégeance n'était pas la plus simple et ma loyauté pas la plus facile à vivre... et j'ai tout foutu en l'air pour un peu de confort, pour quelqu'un qui ne voudra même plus me regarder quand il apprendra ce que j'ai fait...

A nouveau, elle se recroquevilla. C'était cette idée là qui la tuait le plus. Elle allait perdre Remus pour un caprice. Elle n'avait pas pensé à mal, elle avait juste vue la promesse de la tranquillité, de l'arrêt des crises... les conséquences lui étaient passées au dessus mais maintenant elle ne voyait que ça.

- L'amour ne disparaît pas d'un coup. Je ne connais pas personnellement Remus, et je ne peux te donner aucun conseil. Mais s'il t'aime, et que tu l'aimes, la vérité doit s'imposer. On ne bâtit pas l'amour sur un mensonge. Ou un secret si gros.

Il marquait un point. Remus avait déjà accepté beaucoup de chose, mais ça... Comment réagirait-il ? Si elle lui annonçait avoir cédé, avoir rejoint les rangs, il la verrait immédiatement comme une meurtrière à la solde de Voldemort, ce qu'elle n'était pas. Elle n'avait tué personne, elle n'irait quand mission de renseignement. Mais l'adage était peut-être vrai, celui qui peut le mal peut le pire, elle finirait par savoir se battre convenablement, et par devoir tuer...

- Il n'y a aucune issue qui soit indolore. Il ne s'agit pas de choisir la meilleure solution, mais la moins pire.

Encore une fois, il avait raison. Blesser Remus, prendre le risque de le perdre, ou lui mentir et se faire mal toute seule avec quelque chose qu'elle ne pourrait jamais lui expliquer. Seulement, le choix était vite fait.

- La moins pire est de me taire, ce que je fais presque correctement depuis près de deux ans...

Si elle avait pu le dire, elle l'aurait fait, mais de toute façon, parler des missions étaient contraire à l'omerta des Mangemorts. La loi du silence marchait pour tout le monde, elle était persuadée que même sa tante Narcissa qui pourtant vivait au centre du quartier général ne savait pas tout... Elle se ferait torturer si on apprenait qu'elle avait révélé son identité à deux Gryffondor, à deux personnes clairement du côté de l'ordre... Et justement, cette résignation, c'était pour éviter ça.

- Je vais faire ce qui m'incombe, et endurer, comme tous les autres, ça ira... Je ne suis pas aussi forte qu'il le faudrait, mais ça ira... j'ai survécu à pire...

Elle parlait d'une voix creuse et basse, plus pour elle même que pour Chris. Elle avait survécu à Bellatrix s'acharnant sur elle pendant un an, elle survivait à une connexion avec le Mage Noir, elle survivait à des nuits entières secouées par les cauchemars les plus atroces et réalistes qui pouvaient exister... ça irait. Il fallait, pour eux, pour Remus, pour Sirius qui lui avait demandé de vivre un peu mieux...

- Alors tâchons de faciliter cette solution, si tu penses que c'est la moins pire.

Il voulait l'aider. Elle ne savait pas pourquoi, ni comment il comptait s'y prendre, mais il voulait l'aider, c'était clair dans ses propos. Il utilisait la première personne du pluriel, il s'incluait dans le problème... Avant qu'elle ne puisse vraiment réagir, il reprit :

- Je réitère ce que j'ai dis tout à l'heure. Sens toi libre de faire appel à moi tant que tu en aura besoin. Se démener à ménager les autres est une chose, mais se ménager soi même, c'est aussi prendre plus de force pour endurer.

Elle hocha simplement la tête. Déjà, depuis qu'elle était ici, depuis que Remus était là, elle était moins faible. Elle mangeait, elle dormait, elle avait envie de se battre, et cela faisait une différence énorme. Elle résistait, elle n'était plus si résignée. Elle avait prit suffisamment de force pour accepter une mission de repérage, et peut-être que sans les crises, elle irait encore mieux... Ses démons resteraient là, tapis dans l'ombre, près à l'attaquer à nouveau, mais elle pouvait lutter contre eux, contre les mauvais souvenirs qui la hantaient, contre les idées noires.

Elle ne comprit pas réellement le mouvement qu'elle exécuta, mais Chris ne broncha pas, pas immédiatement du moins, alors qu'elle se redressait, sentant enfin l'effet de la potion qu'il lui avait donné. Elle pouvait bouger, elle n'avait plus mal... Elle se projeta en avant et passa ses bras autours de son cou, l'étreignant pendant une seconde avant de se blottir à nouveau dans le canapé, ré-ajustant le plaid sur elle.

- Merci, mais tu n'es pas obligé de le faire...

- J'y tiens.

Il se laissa retomber pleinement dans le fauteuil qu'il occupait, s'éloignant un peu d'elle et sembla réfléchir pendant un instant. Elle ne brisa pas le silence, mal à l'aise et épuisée. Elle avait le sentiment étrange que Chris comprenait plus à son sujet qu'il ne le fallait, et à nouveau, elle en vint à se poser des questions sur son identité. Si il comprenait, si il analysait les symptômes et les mettait ensemble, c'est qu'il était du mauvais côté. Ou qu'il luttait avidement, activement contre le dit mauvais côté.

Avant qu'elle ne puisse poser une question, il demanda :

- Tu veux rester seule pour te reposer ?

La réaction ne se fit pas attendre et Haelya hocha presque frénétiquement la tête, répondant à la négative. Seule était égal à abandon, à sommeil et à cauchemars. Dans son état, elle ne voulait pas se retrouver face à des cadavres, à Greyback, face à sa mère ou à la scène de torture de Shanna et Liam, la première qu'elle avait jamais vu de sa courte vie.

- Je ne veux pas m'endormir...

Elle était consciente de sa ressemblance avec une petite fille têtue refusant de quitter un diner pour aller au lit, mais au point où elle en était, elle savait que Chris ne ferait pas de commentaire à ce sujet. Elle commençait à comprendre qu'il était discret et silencieux, et cela ne la rassurait pas vraiment, ces deux atouts étant prisés chez les partisans de Voldemort.