Let me vampirize you... [ Nathanaël & Sevan ]

_ Vampires will never hurt you.

Le soleil revenait. Mars était définitivement là, et pour une fois, les giboulées n'étaient pas au rendez-vous, laissant un peu de répit aux sols détrempés qui entouraient Poudlard. Nathanaël était sortit, profitant du beau temps pendant que la plupart de ses camarades étaient sortis. Bientôt, le parc et le lac deviendrait la cour de récréation d'une tribut d'adolescent secoués par leurs hormones, et il savait pertinemment que l'odeur ne serait pas supportable. Les jeunes filles en fleurs mettraient à mal sa patience et sa capacité à se retenir, il se doutait bien qu'il éviterait l'extérieur du château sous peu, autant en profiter pour le moment.

Il était assis dehors, un vieux livre à la main. Il avait trouvé une clairière similaire à celle qu'il avait visité avec Elektra, les tombes en moins. C'était un endroit agréable, le soleil trouait les branchages épais de la sombre forêt, et loin de tout, il se sentait bien, détendu. Ici, il n'avait rien à craindre, très peu d'élèves s'aventurant dans la forêt, de peur de croiser les créatures qui l'habitaient.

Un coup de vent passa devant lui, provenant de la lisière, et les pages du livre bougèrent, tournant délicatement alors qu'une violente douleur prenait la gorge du vampire. Humain. A proximité. Se concentrant pour ne pas hurler, il tenta de se calmer et analysa ce qu'il entendait. Des pas, qui se rapprochait, et un cœur, calme et régulier, quelqu'un qui se baladait... A nouveau, une brise battit son visage et une fois de plus, l'odeur se fit insupportablement attirante. Ce n'était pas une jeune femme cependant, mais ça ne ressemblait pas non plus aux hommes gras et sales qu'il avait l'habitude de sentir dans l'école. Tous ces garçons qui se pensaient viriles, transpirants et boueux, revenants du terrain de Quidditch était simplement répugnant, leur puanteur donnait la nausée au jeune de Valmont... mais là c'était différent.

D'un bond, il se leva, percevant une silhouette à l'entrée de la clairière, à quelques trente mètres de lui. Il ferma son livre et le rangea dans la poche arrière de son jean, résistant à la tentation de se rapprocher de l'inconnue. L'odeur était déjà insupportable ici, alors plus près, ça serait du suicide, il ne saurait pas y résister...

- Que faites-vous ici ? lança-t-il, d'un ton neutre.

Il fallut quelques secondes à l'inconnu pour localiser Nathanaël. Un autre moment passa durant lequel il sembla se concentrer sur le visage, mais à cette distance, le vampire se doutait bien qu'il ne devait pas voir grand chose. Ce n'était qu'un humain, après tout. Un mâle qui plus est, soit quelqu'un dont les réflexes et la perception extérieur étaient grossiers, gauches. Les femmes avaient la grâce, les hommes la force... Mais ce jeune homme semblait combiner les deux. De son poste, Nathanaël pouvait voir qu'il était relativement grand, et que sous son uniforme, ses muscles s'agitaient, le maintenant en vie avec une volonté diabolique... et pourtant son odeur, et son apparence aussi, étaient soignées, agréables, intrigantes.


- Je .. Je suis désolé ... Je ne voulais pas vous déranger.

Sa voix était hésitante, intimidée, empreinte d'un respect et d'une distinction qu'il ne connaissait que chez les gens de son monde, et les moldus fréquentant les cours. Les moldus comme celui qu'il avait été, un courtisant, un gentilhomme. Bien entendu, chez lui, cela avait été des apparences, un masque. Il n'avait jamais cette image, de son vivant, les mondanités l'avaient ennuyé dès son plus jeune âge... en fait, il avait bien fait de quitter Bristol Collège et de rejoindre Poudlard, où personne ne le connaissait. Bon, certes, cela c'était soldé d'une facheuse manière, grâce à l'appetit d'Alisse, mais autrement, il aimait cet endroit. Et puis il avait rencontré Elektra ici, sa belle Elektra, la plus ancienne vampire qu'il n'avait jamais rencontré, la plus belle femme sur laquelle il avait posé son regard sombre.

Entre temps, l'inconnu avait fait demi-tour, et l'odeur agréable s'en allait avec lui, faisant froncer le nez à Nathanaël. Il voulait savoir qui il était, parce que ça l'intriguait. Jamais auparavant il n'avait eut le désir de mordre un homme, c'était une première, c'était troublant et un rien gênant, parce que se nourrir sur un humain équivalait à un acte sexuel, et pendant toute sa vie mortelle, Nathanaël avait été certain de n'être attiré que par la gente féminine. Un peu trop, peut-être, et cela lui avait attiré pas mal d'ennuis. Il faudrait d'ailleurs qu'il aille voir Sibylle, un jour, mais Elektra devrait être là, pour le retenir, pour qu'il ne la tue pas... Malgré tout, la belle moldue brune avait encore trop d'emprise sur lui, il pensait souvent à eux, à ce qu'il avait été, même s'il ne le fallait pas.

- Vous êtes nouveau, n'est-ce-pas ?

Un sourire satisfait se peint sur le visage de Nathanaël quand il vit que l'inconnu s'était arrêté à la simple phrase. Il connaissait déjà la réponse, parce qu'il aurait déjà eut l'occasion de croiser une telle odeur si ce n'était pas le cas, donc c'était forcément un nouvel élève...

En un clin d'oeil, Nathanaël eut traversé la clairière et se posta ostensiblement devant son interlocuteur, ne s'inquiétant pas des signes qui le trahirait. Pour le moment, il doutait du fait que ce garçon sorte vivant de la forêt interdite, il ne parlerait donc pas. Il avait un sourire engageant mais froid accroché aux lèvres, et il attendait sa réponse, se tenant à quelques mètres du Poufsouffle, par pure précaution...

Un ange passa, et dans le bruissement des feuilles froissées doucement par le vent qui traversait la forêt, Nathanaël entendit le cœur de son interlocuteur changer de rythme, son afflux sanguin devenir plus violent, au poing que cela aurait du empourprer ses joues. Le vampire ne respirait plus, même si l'idée était tentante. La promiscuité était dangereuse, et même si c'était un jeune homme qu'il avait en face de lui, il ne donnait pas chère de sa capacité à résister à sa soif si il prenait une pleine goulée de cet air chargé de parfum attirant, mélange subtile de virilité et d'adolescence, de grâce et de force.

Finalement, le palpitant de l'inconnu reprit un rythme plus viable, et le Poufsouffle sembla revenir à lui même.

-Absolument, vous, en revanche, avez l'air d'un fin habitué des endroits inconnus du domaine, je me trompe ? Vous êtes ?

Nathanaël arqua un sourcil, habitué à ce que l'on se présente à lui en premier, pas l'inverse. Qu'à cela ne tienne. Il fit un pas en arrière, puis un nouveau, retournant lentement vers l'arbre contre lequel il avait été appuyé quelques instants plus tôt. La distance qu'il instaurait était autant pour la sécurité du jeune homme que pour sa propre prudence. Jamais il n'avait considéré mordre un humain mâle, c'était une première, c'était perturbant, mais pourtant, il regardait avec envie le cou du garçon, là où sa peau tendre et fraiche, jeune, palpitait doucereusement sous les impulsions de son cœur.

D'une voix forte, il répondit, marchant toujours à reculons, sentant le soleil mordre sa peau, le bruler doucement, marque délectable qu'il avait détesté de son vivant et qu'il savourait à présent.

- En effet, j'ai parcouru cette forêt quelques fois... Je me nomme Nathanaël de Valmont, et en toute honnêteté, il serait préférable que vous filiez rapidement, cet endroit n'est pas... sûre.

Euphémisme. Mais l'immortel se voyait mal lâcher de but en blanc que si l'autre ne prenait pas prestement ses jambes à son cou, il serait fort probable qu'il ne ressorte pas de cette forêt... Ou alors, entre quatre planches de sapin... Si possible, Nathanaël voulait éviter cette possibilité... Le jeune homme était trop beau pour finir d'une manière si sordide.

Attendez... venait-il de penser "beau" ? Beau comme dans Attirant ? Il secoua imperceptiblement la tête avant de jauger à nouveau le Poufsouffle, mais l'idée ne partait pas. Non, avec sa peau pâle et ses lèvres ourlés, ses yeux expressifs et ses traits graciles et fins, il n'y avait pas d'autre qualificatif que "Beau" qui venait à l'esprit du vampire... ou alors, il devait faire preuve de mauvaise foi pour en trouver...

Nathanaël fronça le nez quand il remarqua qu'au lieu de suivre son conseil, de prendre en compte la menace latente dans les mots qu'il avait prononcé et de s'enfuir, le Poufsouffle avançait vers lui, s'engageant à son tour dans la clairière, sous les rayons du soleil. Son cœur battait à tout rompre et le vampire comprit que, comme Narcissa, il avait comprit que quelque chose clochait mais il ne faisait rien pour se sauver, pour sauver sa peau. Pauvre fou.

- Pourquoi donc reculez-vous ? Ais-je fait quelque chose de mal ?

Cette fois-ci, Nathanaël manqua de jurer. Cette manie qu'avait les mortels de chercher la compagnie de ceux qui les mèneraient à leur perte. C'en était presque pathologique, malsain, et il sentait des doutes et des inquiétudes dans la voix du jeune homme, comme si il pensait réellement avoir provoqué la fuite du vampire. En un sens, il l'avait fait, de part son odeur et le côté désirable de son être, mais il n'y était pour rien, strictement pour rien. Il était né ainsi, beau et alléchant, une victime de choix.

Cessant immédiatement de penser à comment le charmer et le tuer, Nathanaël arriva bientôt près de l'arbre et son camarade se tenait non loin de lui. Il manqua de s'étouffer lorsque le jeune homme demanda :

- Vous êtes le responsable de mon insécurité ici , n'est-ce pas ? Vous n'êtes pas ... humain .

Nathanaël aurait pu hocher la tête et s'arranger pour disparaitre. Il lui aurait fallut un dixième de seconde pour être à l'autre bout de la clairière, et le double pour avoir atteint les profondeurs sombres et dédaléenne de la forêt, se soustrayant à la vue du garçon. Mais il ne pouvait pas se résoudre à bouger, à partir. C'était étrange, mais il préférait que le brun prenne la fuite, cela l'arrangerait, il se sentirait sans doute moins... lâche. Et frustré.

Sans chercher plus longtemps, il décida de lui faire peur et dans un mouvement si vif que l'autre ne du pas le voir, Nathanaël s'avança et saisit la gorge de l'inconnu, avant de le plaquer violemment contre l'arbre le plus proche. Les pieds du jeune homme ne touchaient plus le sol, et le vampire retenait son souffle pour ne pas humer les respirations paniquées qui coulaient entre ses lèvres parfaites. Il se concentrait également pour faire abstraction du sang qui battait sous sa main, et il relâcha un peu sa prise, sans pour autant faire redescendre le garçon. Il ne voulait pas l'abîmer, il ne voulait pas qu'il parte, mais il ne pouvait pas prendre un tel risque.

Il posa un regard mauvais sur sa victime et prenant soin de montrer ses crocs, derrière ses lèvres retroussées, il murmura doucement, machiavélique :

- Il va me falloir votre nom, pour vous faire une sépulture digne de ce nom... sauf si vous jurez qu'au moment même où je vous lâcherais, vous filerez, ne reviendrez pas, et ne parlerez de ça à personne...

Le jeune homme eut du mal articuler, mais il parvint quand même à sortir d'une manière honorablement intelligible compte tenu de sa position :

- Je n'ai rien à jurer à un inconnu . Je m'appelle Sévan et, en tout franchise, je vous trouve abominablement séduisant .

Nathanaël s'était apprêté à rouler les yeux, agacé par ce remake douteux de son incident avec Narcissa. Compulsion il y aurait donc, mais il avait manqué de s'étouffer quand le dénommé Sévan avait terminé sa phrase.

Effrayant, dégoutant, flippant... il aurait comprit. Séduisant... Oui aussi, il l'était bien sur, il en avait conscience, il s'en servait mais.. mais... mais sur un homme ? Sur un garçon ? C'était...

- Pardon ?

Sa voix était incrédule. Si c'était une ruse pour le déstabiliser et lui faire lâcher prise, cela n'avait pas marché. Certes, il se retrouva prit de court, et il relacha un peu plus l'étau qu'il maintenait autours du cou de sa potentielle victime, mais il n'avait pas lâché, l'autre ne filerait pas...

Ce garçon l'intriguait, d'autant plus que ça déclaration laissait Nathanaël perplexe.

- Tu te fous de moi, n'est-ce-pas ?

Il avait laissé tomber la politesse, peu importait les bonnes manières, il se sentait mal à l'aise.

Un sursaut de rire le secoua et Nathanaël le fusilla du regard. Comment pouvait-il rire quand un vampire maintenait un étau autour de sa gorge, le plaquant contre un arbre et le menaçant de le vider de son sang dans une forêt si dense que personne ne l'entendrait hurler ? Il se tut cependant et Nathanaël fut soulagé, mais cela ne dura qu'une seconde.

- Pas le moins du monde .

Son ton manqua de faire jurer l'immortel. C'était... Okay. Très bien, ce jeune homme était gay, et même si Nathanaël devait reconnaitre qu'il était très beau, cela le mettait plus que mal à l'aise. C'était stupide, mais sans être homophobe, l'adolescent qu'il avait été c'était toujours vanté d'être hétérosexuel à cent pour cent... et pour une histoire d'hémoglobine, d'odeur de chair, pour une histoire de soif, d'animalité vampirique, il remettait tout ça en cause et foutait un bordel sans nom dans sa tête.

Comme ayant soudain reçu un violent choc électrique, il retira sa main de la gorge du dénommé Sevan et fit plusieurs pas en arrière, le laissant s'écrouler au sol sous la surprise de la libération. Il s'éloigna sans plus attendre, saisissant ses affaires et commençant à traverser la clairière, attentif au moindre bruit de ce qu'il se passait autours de lui.

Il se rapprocha encore un peu, et déclara :

- Et si dans le fond c'était ce que je recherchais ? Ca n'a pas l'air de te plaire ... C'est dommage .

Nathanaël roula les yeux, exaspéré, mais aussi choqué et un peu effrayé. Que se passerait-il s'il le tuait ? Ou s'il parlait, racontait à tout le monde son secret. Il avait eut de la chance avec Narcissa, il avait réussit à se débrouiller pour être sur qu'elle ne divulguerait sa nature à personne, mais il n'était pas certain de pouvoir renouveler l'opération...

Et puis... aussi adorable et tentant fusse-t-il, aussi délicieuse soit son odeur, il restait un homme. L'idée rebutait un peu le vampire, aussi stupide et minime que cela puisse paraitre. Après tout, c'était un tas de chair comme les autres... mais l'idée d'avoir son corps contre le sien, serré comme dans une étreinte, l'idée de planter ses dents dans son cou... il y avait quelque chose de profondément sexuel dans le procédé...

- Si c'est ce que tu veux, alors tu dois être pas mal dérangé... je pourrais te tuer, t'arracher la tête... te transformer, aussi, et ça serait pire que tout, tu n'as pas idée, l'immortalité, la soif, le...

Il se tut, réalisant que d'en parler lui faisait réellement mal. Il n'aimait pas ressasser ce qu'il avait perdu. Il se sentait soudainement nauséeux et épuisé, chose qui pourtant ne devait pas arriver...

- Tu devrais partir, ce n'est pas une bonne idée que de désirer ça...

Il n'y avait plus de menace dans sa voix, mais au contraire c'était presque une supplique. Il avait envie d'être seul, il se sentait mal, il avait faim, soif comme jamais, sa gorge le brulait. Reculant, il s'enfonçant dans la pénombre, à couvert des arbres, et alla s'adosser contre un arbre, tournant le dos à la clairière, et glissant doucement jusqu'à finir au sol, prostré et presque tremblant. Faible. Même immortel, il restait faible, perdu et vulnérable. C'était pathétique.

Il ne releva pas la tête. Il n'en avait pas besoin pour savoir que le Poufsouffle se rapprochait. Il n'avait pas suivi son conseil, il s'engageait, il avançait dans la forêt, cassant les branches sous ses pieds, faisant bruisser les feuilles qui entravaient son chemin. Avait-il seulement idée du vacarme qu'il faisait ? N'importe quelle créature l'aurait tué en deux temps trois mouvements, mais quelque chose disait à Nathanaël qu'être discret n'était pas réellement l'objectif premier du garçon.

Et son odeur. Oh Merlin, son odeur. C'était une vraie torture. Maintenant qu'il ne faisait qu'attendre la suite des événements, guettant l'autre pour tenter d'anticiper ne serait-ce qu'un minimum, il ne pouvait pas ignorer ce parfum doux mais pourtant masculin, diablement attirant, alléchant. Le plus sage aurait été de s'enfoncer d'avantage dans les bois, pour fuir, mais il se refusait soudain à faire prendre le moindre risque à son camarade, qui le suivrait certainement. Ils étaient déjà suffisamment loin en terrain ennemi, aller tenter les centaures n'étaient pas une bonne idée.

Toujours est-il que rapidement, il fut assis à ses côtés. Nathanaël se figea lorsque Sevan se pencha vers lui pour murmurer quelque chose, mais ce ne fut rien en comparaison à sa réaction face aux dires à proprement parler :

- Mors-moi , mors-moi je t'en conjure ...

Le vampire hésita. Rire ou jurer ? C'était tout simplement ridicule. Atrocement tentant, bien sur, que de ce faire offrir comme ça un cou tendre et du sang voluptueux et sans doute délicieux, mais c'était une folie qu'il ne voulait pas se permettre. Cela le rebutait, tout simplement. Ce n'était ni chauvin ni conservateur, de toute façon, il était déjà damné, mais l'idée le gênait réellement. Il savait ce que la morsure provoquait, il en était conscient : une montée d'endorphine et d'adrénaline qui rendait le tout aussi puissant qu'un orgasme... Il n'était pas certain de savoir gérer un homme se tordant et gémissant de plaisir sous ses assauts, c'était un peu au dessus de ses capacités à rester calme.

- Hors de question, répondit-il, stoïque, sans relever la tête.

Il était toujours prostré, par terre contre l'arbre, Sevan dangereusement penché vers lui. A vrai dire, il était complétement obnubilé par les battements de son cœur, par le bruit du sang gonflant ses veines, par ses respirations irrégulières et ses déglutitions difficiles... Attendez, il était... Nerveux. Comme piqué au vif, Nathanaël tendit son dos, redressant son cou et se rendant compte qu'il était beaucoup plus près qu'escompté. Beaucoup, beaucoup plus près. Il sentait son souffle contre sa peau, et quand il tourna la tête, le souffle passa sur ses lèvres, envoyant directement dans sa bouche des arômes insoutenable.

Il avala péniblement sa salive. Il avait soif, d'un coup. Très soif. Il ferma les yeux, reculant la tête et cherchant ensuite une motivation pour se lever, bouger, fuir au plus vite. Motivation qui ne vint pas. D'une voix morne, cadavérique, il déclara, plus pour lui même que pour le jeune homme qui était quasiment alanguit sur lui :

- Je ne peux pas, c'est...

" mal " ? Non pas plus que ça. " Pas dans mes principes " ? Mec, t'es un vampire, tu t'en fous ! " Tentant mais obscène " ? Ouais, et avec la petite blondinette sur la tour d'Astronomie, c'était une profession de foi ? Il fit taire la voix de son cousin, bloquant sa respiration et laissant sa voix en suspend. Il était aux aguets, tendus comme jamais, anxieux de savoir ce que Sevan allait bien pouvoir trouver à faire ou à dire. Avec un peu de chance, il filerait, vexé. Mais là encore, Nathanaël n'était même plus sur de vouloir le regarder partir...

Nathanaël se braqua. Jamais auparavant il n'avait été si aux aguets, si tendu, si alerte. Son corps entier était contracté, il fallait qu'il parte qu'il bouge, qu'il se sauve, vite, au plus vite même, avant que les choses n'empirent, mais c'était déjà trop tard. Sevan avait posé ses lèvres contre la peau de son cou, et il aspirait, voulant clairement laisser sa marque. Il mordait, même, et malgré la panique qui s'installait dans l'esprit de Nathanaël, il ne put s'empêcher de trouver cela ironique.

Et envoutant. Diablement tentateur. Le contact était délectable, doux... follement agréable. Il était tiraillé entre l'envie de repousser le jeune homme et celle de le prendre dans ses bras et de happer ses lèvres dans un baiser fiévreux et dévastateur. Mais il ne fallait pas, non, il ne pouvait pas, quelque chose lui hurlait que c'était mal, que ça se finirait d'une manière détestable.

- C'est ?

La question le fit tiquer mais autre chose le choqua. Sang. Odeur de sang. Âcre et rouillée pour les humains, délicieuse et attirante pour les immortels. Il sentait du sang. Il déglutit difficilement. D'où venait cette odeur, c'était du sang humain en plus... Il ne réalisa que trop tard que cette odeur tentatrice venait de Sevan, qui se pencha pour l'embrasser. Il était si effrayé par ce qui se préparait qu'il ne le repoussa même pas, laissant le Poufsouffle effleurer tendrement ses lèvres, avec une délicatesse incongrue.

- Terriblement délicieux ...

Nathanaël se retint de répondre qu'il n'avait pas idée de ce dont il parlait. Dans sa bouche, tenu et fuyant, le léger gout de sang le rendait fou, il faisait de son mieux pour se contrôler, pour enrayer la pulsion, mais c'était trop tard. Bientôt, Sevan alla blottir sa tête au creux de son cou, et il sentit son souffle désordonné venir s'écraser contre sa peau. Il voulait son sang, mais pas seulement, il le voulait tout entier, le gout de l'interdit et l'envie de nouveauté prenant finalement le dessus, comme il l'avait craint.

- Ta gêne te rend encore plus irrésistible ...

C'était donc visible à se point ? Nathanaël se renfrogna un peu, mais le désir pour le sang de Sevan, pour son corps quasi-parfait contre le sien, ne passait pas, loin de là. Seulement, maintenant que cela avait été dit à voix haute, il n'osait plus bouger, il était mort de trouille, comme un gamin devant sa première fois. Il ferma les yeux, déglutissant difficilement et tentant de faire abstraction de l'odeur d'hémoglobine qui emplissait l'air ambiant. Bientôt, l'odeur serait loin, la plaie refermée, il fallait simplement qu'il tienne quelques minutes.

Mais plus il se retenait, plus il en avait conscience, plus c'était compliqué, et plus cela lui demandait de la volonté. Il tenta de se redresser un peu, et Sevan ne bougea pas, gardant sa tête contre son cou. Nathanaël ne savait pas quoi faire. Il aurait dû fuir, retourner à son train-train, égorger une biche, étancher sa soif et retourner voir Elektra comme si de rien n'était, mais il ne pouvait pas, il n'arrivait pas à bouger, paralysé par un désir incongru et incommensurable.

" Et Merde... " Presque immédiatement, il bougea, faisant un sorte que Sevan relève la tête, et il planta un baiser dans son cou, s'enivrant de l'odeur délicate et cependant virile qui émanait de cette peau d'enfant, appréciant la texture qui défilait sous ses lèvres glacées et se retenant de mordre. Presque inconsciemment, il fit courir une main sur les côtes de l'adolescent, le sentant frémir sous ses caresses et s'aventurant plus bas, jusqu'à poser ses doigts puissants sur la hanche fine et presque féminine de sa prochaine victime.

Serrant un peu sa main pour prévenir le jeune homme, il mordit, laissant le sang couler entre ses lèvres et manquant de gémir de satisfaction quand il put enfin savourer le liquide vitale du Poufsouffle. Il aspira un peu, ne voulant pas forcer, puis redressa son cou avant de répéter la manœuvre de l'autre côté du visage de Sevan, plantant l'enchainement baiser et morsure et le sentait frisonner à chaque étape. Quand il mordit cette fois, il ne sût retenir le petit râle de contentement qui quitta sa bouche et s'éleva dans la forêt.

Sans préavis cependant, il recula, choqué, appuyant son dos contre l'arbre et lâchant pratiquement Sevan. Il venait de prendre du plaisir avec un homme. Même si ce n'était que les prémices, il était... pris de court. C'était une première, un monde qu'il ne connaissait pas, et ça l'effrayait. Et s'il ne se contrôlait pas, et s'il tuait le magnifique étudiant sans le faire exprès... Il ne se le pardonnerait pas. La sensation était étrange, et étonnement, ce qu'il gardait à cet instant précis ancré en lui n'était pas le gout du sang mais le désir qu'il épprouvait à l'égard du Poufsouffle...

Alors qu'un silence de plomb s'appesantissait entre les deux élèves, Nathanaël resta interdit, presque choqué, comme brulé. Sur son corps, il sentait distinctement les mains de Sevan qui glissait, frôlant le tissu d'une manière délicieuse. A vrai dire, il était tant aux aguets qu'il pouvait sentir, à travers ses doigts, les battements irréguliers de son cœur, il sentait les pulsassions contre sa peau qui frappaient, désordonnées, triviales et vitales.

Il y avait plus qu'une simple soif, Nathanaël en était convaincu. C'était un désir bien plus puissant que seul l'appel de l'hémoglobine, il le voulait, pour lui tout seul, il voulait être maître de sa peau et de ses caresses pendant l'espace de quelques heures. Seulement, Sevan avait eut raison quand il avait mentionné la gêne. Il était perdu, déboussolé, frappé de plein fouet par ce désir qu'il ne comprenait pas et tiraillé par une curiosité malsaine. Il voulait essayé, il voulait faire de se garçon son expérience masculine, pour voir ce que cela faisait. L'idée prenait doucement le pas sur la retenue, et quand les mains du Poufsouffle se firent plus intrusives, il ne le repoussa pas.

Il n'aurait pas pu, de toute façon, pas quand son camarade lui assénait un baiser d'une puissance rare, loin de la timidité du premier contact. Nathanaël sentait encore le sang qui perlait aux deux cicatrices qu'il avait infligé à l'adolescent, mais il se retenait, trop concentré à lui rendre son baiser, à garder la constance de leur étreinte, trop tendu dans sa tentative pour ne pas vriller alors qu'à présent, les mains du garçon s'aventuraient dangereusement vers son entre-jambe, effleurant par instant sa virilité déjà douloureusement éveillée. A ce rythme là, il ne lui faudrait pas longtemps pour perdre totalement pied, pour oublier jusqu'à l'existence de son appréhension.

D'ailleurs, délicatement, il referma ses bras autours du corps fins et gracieux, saisissant précautionneusement la nuque de Sevan alors que son bras libre était dans son dos. Le plus doucement possible pour ne pas le blesser et surtout, pour ne pas mettre un terme au baiser, il le fit bouger, et bientôt, le Poufsouffle se retrouva assis devant Nathanaël, ses jambes de part et d'autre de celle du vampire.

A regret, l'immortel mit un terme au baiser, se mordant les lèvres pour ne pas se jeter sur les deux atteintes sur les clavicules de son camarade. Il ne résista pas longtemps cependant mais, se concentrant pour ne plus le mordre, pour garder la puissance de l'endorphine pour un peu plus tard, il se contenta de passer doucement sa langue, essuyant le sang et faisant frémir le garçon. Déjà, il pensait au moment propice pour le mordre, pour lui insuffler cette vague de plaisir violent qui venait quand les crocs perçaient la chair. Il savait très bien où ils allaient, et à vrai dire, il n'avait pas peur, il était même impatient. Réellement impatient, il voulait Sevan, personne ne le saurait jamais, il voulait cet adolescent, ils seraient un plaisir immoral mais parfait, et l'idée fit sourire le vampire.

Il se redressa un peu, saisissant le bas de la chemise de son camarade et tirant doucement pour le dénuder partiellement, découvrant son torse pâle et désirable, parfait, musclé sans trop l'être. A cet instant, il ne rêvait que de déposer ses lèvres sur chaque parcelle de son corps, pour s'enivrer de sa peau, de son parfum envoutant, pour provoquer avec satisfaction des soupirs et des râles, pour le faire trembler du désir qui l'animait. Dans la foulée, il sera l'adolescent contre lui avant de se projeter en avant, le faisant tomber doucement sur le tapis d'herbe et s'alanguissant sur lui alors que presque immédiatement, il parfait découvrir son torse, vivant pleinement chaque instant de cette première fois, de cette expérience inédite et excitante au possible.

Il releva la tête quand un soupir d'impatience s'échappa des lèvres de Sevan et leur regard s'accrochèrent. Nathanaël ne cilla pas, au contraire, un sourire confiant se posa sur ses lèvres alors qu'il revenait vers la bouche du Poufsouffle pour lui assener un baiser plus doux, suçotant ses lèvres et en faisant sortir quelques gouttes de sang, délicieuse parenthèse dans un combat qui n'était même plus centré sur l'hémoglobine.

- Tu es presque plus doué que moi.

La voix amusée mais presque rauque le frappa de plein fouet, mais avant qu'il n'ai pu dire quoi que ce soit, se défendre de quelques manières, Sevan avait lancé un puissant baiser, capturant ses lèvres avec une violence nouvelle, une force inédite, emprisonnant sa nuque de ses doigts fins pour que Nathanaël ne recule pas. S'il avait désiré le faire, il aurait pu, bien sûr. Il était immortel, il avait la force de se soustraire à l'étreinte que maintenant le Poufsouffle, aussi passionnée fut-elle. Seulement, il ne bougeait pas, pour le moment, se contentant de rendre le baiser qu'on lui assenait, sentant venir en lui un désir neuf, augmenté par leurs peaux s'effleurant à chaque mouvement.

Quelques secondes auparavant, dans une suite de mouvement qui avaient semblé anormalement fluide et naturel, bon nombre des habits que portaient les deux adolescents avaient filé, allant s'écraser pathétiquement sur le sol de la forêt, dans des bruits tenu et étouffé. Chemise, chaussures, pantalons, chaussettes... petit à petit, ils s'étaient déshabillés, écoutant le désir visiblement mutuel qui les attiraient, se retrouvant l'un sur l'autre en caleçon.

Un éclair de lucidité passa dans le crane de Nathanaël, et il se dégagea de l'étreinte de Sevan, se reculant presque complétement, mettant quasiment fin à tout contact. Sa voix se brisa en un murmure paniqué quand il déclara, essoufflé :

- Je ne peux pas... Je ne sais pas... Je

" vais te tuer, je te désire trop pour savoir me contrôler et ne pas te tuer " . La fin de la phrase faisait échos dans sa tête, il savait très bien que l'issu risquerait d'être catastrophique, qu'il allait le blesser, lui briser les os, lui éclater la nuque, qu'il allait mordre cette peau parfaite et le vider de son sang. Il ne se souvenait que trop bien de ce qu'il s'était passé avec Alice... Et Alice n'était pas fragile, pas cassable. Et puis, même s'il l'avait désiré, ce n'était rien en comparaison à ce qu'il ressentait à cet instant précis. La nouveauté, le corps soudain désirable de Sevan dans cette nudité partielle, l'incongruité de la situation, le fait qu'on puisse très bien les surprendre, le côté interdit de la situation. Il y avait de la perversion, dans cette histoire, mais le résultat était si intense que Nathanaël se foutait pas mal du jugement potentiel.

Doucement, levant les mains, il vint encadrer le visage de Sevan, lui tenant la mâchoire. Ils étaient assis face à face, leurs jambes emmêlées, et ils se toisaient, comme attendant un signe. Les doigts du Serdaigle caressèrent délicatement les joues, les tempes et le cou de son camarade, s'étonnant des frissons qu'il lui arrachait, se sentant gêner de provoquer et de ressentir autant de force, mais ne pouvant pas s'empêcher de le dévorer des yeux. Il était fin, presque maigre, à peine musclé, un corps d'adolescent juvénile, et sur ses clavicules saillantes, on pouvait voir les deux traces de morsures, écarlates sur sa peau diaphane.

Tiraillé comme jamais, Nathanaël céda finalement à la tentation, se penchant en avant et déposant légèrement ses lèvres sur celles entrouvertes de Sevan, restant mutin et délicat, mais se rendant compte que cette attitude était pire que tout, car suggestive et tentatrice. Il avait le bas-ventre en feu, il le voulait comme jamais il n'avait désiré personne, pas même Sibylle. Il le voulait mais c'était mal, et dangereux.

Il mit fin au baiser, lâchant la prise qu'il maintenait autours du visage du Poufsouffle, et se redressant rapidement, gracieusement. Il fit quelques pas en arrière, hochant la tête et affichant un sourire sourire repentant, quoi qu'un peu horrifié.

- Je suis désolé...